La loi européenne « Animal Health Law » (2016/429) a pour objectif de contrôler la propagation des maladies transmissibles d’un animal vers un autre ou vers l’humain au moyen de règles et de principes de préventions. Elle a été adoptée en mars 2016 par le Parlement et le Conseil européen et est d’application depuis le 21 Avril 2021. Cette loi concernant les animaux domestiques, les animaux sauvages et certains produits alimentaire s’applique donc également au domaine de l’apiculture. Elle implique davantage l’apiculteur dans la gestion de l’état sanitaire de son rucher et l’invite également à prendre des mesures de biosécurité lorsque ces dernières sont nécessaires.
Lors de la dernière réunion du Groupe de travail « abeilles » menée par Nadine Kollmorgen du SPF SPSCAE, deux arrêtés royaux ont été discutés. Il s’agit :
- Du nouvel arrêté royal fixant les règles de notification des maladies, les mesures de surveillance, d’éradication et de contrôle de certaines maladies répertoriées et nouvelles maladies (=AR horizontal). Cet arrêté royal est en pleine élaboration et est intimement lié à la loi « AHL » étant donné qu’il permet en partie son application sur le territoire belge.
- De l’arrêté royal du 9 mai 2017 relatif à la guidance vétérinaire dans le cadre de la lutte contre la varroase. Cet arrêté royal est à la fois impacté par l’entrée en vigueur de la loi « AHL » et le nouveau règlement européen 2019/6 sur les médicaments vétérinaires.
Nouvel arrêté royal fixant les règles de notification des maladies, les mesures de surveillance, d’éradication et de contrôle de certaines maladies répertoriées et nouvelles maladies (=AR horizontal)
Cet arrêté royal est en pleine élaboration par le SPF SPSCAE. Il a pour objectif de réglementer l’obligation de déclaration des maladies reprises dans la loi « AHL » mais également de rendre obligatoire la déclaration d’autre maladies (non reprises dans la loi « AHL »).
En ce qui concerne les maladies des abeilles à déclaration obligatoire reprises dans la loi « AHL », on retrouve la loque américaine, le petit coléoptère des ruches, l’acarien Tropilaelaps et la varroase. Selon la loi « AHL », un certificat sanitaire attestant l’absence de ces maladies est nécessaire lors d’un transfert de colonies d’abeilles d’un état membre vers un autre. Toutes ces maladies devraient également faire l’objet d’une surveillance passive et être à déclaration obligatoire sur le territoire belge, par soucis de conformité à la loi européenne. Cependant, étant donné sa présence sur l’ensemble du territoire belge (maladie endémique), la varroase fait exception et n’est donc pas renseignée comme maladie à déclaration obligatoire sur le sol belge par l’arrêté royal horizontal. Pour la même raison, la varroase ne fait pas partie d’un programme national d’éradication facultatif sur le territoire belge, alors que cela pourrait être le cas selon ce qui est stipulé par la loi européenne (AHL). L’état fédéral belge estime qu’un tel programme d’éradication s’avèrerait non opportun étant donné le caractère endémique de cette maladie.
Pour les maladies non reprises dans la loi « AHL » mais initialement à déclaration obligatoire sur le sol belge, on retrouve l’acariose et la loque européenne. Le choix d’intégrer ces 2 maladies dans l’AR horizontal en tant que maladies à déclaration obligatoire est discuté. L’autorité fédérale (SPF SPSCAE et AFSCA) propose de seulement maintenir la loque européenne à déclaration obligatoire. En effet, l’AFSCA affirme que l’acariose n’a pas été recensée sur le sol belge depuis 20 ans et qu’il serait encore temps de la rendre à déclaration obligatoire si jamais elle venait à réapparaitre. Le secteur apicole exprime à la fois son accord pour le maintien de la loque américaine et son désaccord pour le retrait de l’acariose comme maladie à déclaration obligatoire. Le VBI pense en effet que les abeilles peuvent être infectées depuis l’étranger par le biais de l’importation et qu’il faut intégrer l’acariose dans l’AR horizontal comme maladie à déclaration obligatoire afin de contrer ce risque et d’agir rapidement en cas de détection de la maladie. In fine, la loque européenne et l’acariose sont donc reprises comme maladies à déclaration obligatoire dans l’arrêté royal horizontal.
Le SPF SPSCAE (Nadine Kollmorgen) rapporte que le fait de rendre la loque européenne et l’acariose à déclaration obligatoire en Belgique ne devrait pas entraver la libre circulation des abeilles. L’AFSCA (Jef Hooyberghs) ajoute que la Belgique ne peut pas exiger d’un autre pays que les abeilles importées soient exemptes de loque européenne et d’acariose si ce n’est pas le cas sur son territoire. L’apiculteur qui importe des abeilles devra donc veiller à les isoler (en appliquant des mesures de biosécurité) tant qu’il ne sait pas si elles sont indemnes de ces maladies.
En résumé, les avis du Groupe de travail « abeilles » concluent qu’il n’y a pas de déclaration obligatoire pour la varroase et que l’obligation de déclaration pour la loque européenne et l’acariose sont maintenues dans l’AR horizontal. La question de la déclaration obligatoire des virus spécifiques aux abeilles est également abordée mais aucune conclusion n’est apportée. Le sujet sera débattu lors du prochain groupe de travail.
Arrêté royal du 9 mai 2017 relatif à la guidance vétérinaire dans le cadre de la lutte contre la varroase (SPF SPSCAE)
Comme énoncé précédemment, cet arrêté royal est à la fois impacté par l’entrée en vigueur de la loi « AHL » et le nouveau règlement européen 2019/6 sur les médicaments vétérinaires.
Dans un premier temps, le nouveau règlement européen 2019/6 crée des zones de flou en ce qui concerne le stockage (par le propriétaire des animaux) de médicaments nécessitants une ordonnance. Initialement, un apiculteur qui veut utiliser et ré-utiliser de tels médicaments doit demander un DAF (document d’administration et fourniture) à un vétérinaire lors de la première utilisation et un second DAF lorsqu’il souhaite utiliser les restes des médicaments pour un autre traitement. Ces deux DAF doivent être documentés dans le registre de l’apiculteur. Cependant, aucune information relative au sujet n’a été abordée dans le nouveau règlement européen 2019/6. Il est tout de même important de rappeler que le stockage de médicaments ne nécessitants pas une ordonnance n’est pas réglementé. En ce qui concerne le cas particulier des médicaments vétérinaires libres de prescription à l’étranger mais sous prescription en Belgique, ils doivent être fourni via la cascade et peuvent donc être obtenus via le vétérinaire sur prescription. Enfin, le NGROD précise que le nouveau règlement sur les médicaments vétérinaires est interprété de manière très stricte par l’AFMPS. Chaque écart par rapport au mode d’administration décrit dans la notice d’un médicament vétérinaire doit désormais être documenté méticuleusement.
Dans un second temps, la loi « AHL » donne une plus grande responsabilité à l’apiculteur. En cas de problème, ce dernier se doit de contacter un vétérinaire qualifié qui fera ensuite le lien avec les autorités. Il existe désormais en Belgique des numéros de téléphones pour joindre un réseau de 40 vétérinaires (néerlandophones / francophones) spécifiquement formés aux maladies des abeilles et disponibles 24h/24h. Vous pouvez contacter Paul Vandevelde (vetpaulvdv@skynet.be 0475/557566) ou Kris Baert (kris.baert@UGent.be 0476/503867) pour la Région flamande et Benjamin Charles (0498 70 40 62) pour la Région wallonne et la Région germanophone. Après avoir contacté le réseau, le vétérinaire qualifié le plus proche se rendra sur place dans les 12 à 24h pour examiner les colonies et établir un rapport qu’il remettra à l’apiculteur. Ce service ne sera offert qu’aux apiculteurs enregistrés auprès de l’AFSCA.
Travail collaboratif pour l’arrêté royal du 9 mai 2017 ?
Le cabinet Clarinval (Jean-Pierre Servotte) est d’avis que la guidance simultanée de plusieurs apiculteurs est nécessaire pour arriver à une bonne coordination de la lutte contre le varroa. Selon lui, plusieurs apiculteurs devraient être regroupés dans une unité sanitaire avec un « responsable sanitaire » qui pourrait faciliter la distribution de médicaments vétérinaires aux apiculteurs. Cependant, le SPF SPSCAE rappelle que le règlement européen 2019/6 sur les médicaments vétérinaires n’autorise que le détenteur et/ou le propriétaire des animaux à recevoir une prescription du vétérinaire pour ses animaux, ce qui n’est pas le cas pour un « responsable sanitaire ».
Le NGROD (Theo Borgers) soutient l’idée que la santé des abeilles doit être considérée de manière plus large. Un système de réseau et de collaboration doit être mis en place entre les vétérinaires et les apiculteurs, ce qui permettrait par exemple d’informer le secteur apicole belge d’une région ou d’une zone présentant une maladie ou un problème. De cette façon, certaines maladies qui peuvent se propager rapidement, comme la loque américaine, pourraient être détectées à un stade précoce. Un échange d’informations entre l’apiculteur et le vétérinaire devrait avoir lieu par région.
Suppression de l’arrêté royal ?
Le Groupe de travail « Abeilles » ne voit aucune valeur ajoutée au maintien de l’arrêté royal du 9 mai 2017 relatif à la guidance vétérinaire dans le cadre de la lutte contre la varroase et recommande la suppression de ce dernier.
Disponibilité des médicaments vétérinaires.
Pour commander des médicaments par internet depuis un état membre vers la Belgique, il faut faire appel à un détaillant qui peut être soit un pharmacien soit un vétérinaire. L’AFMPS (Emmanuelle Vanaerschot) précise que le détaillant peut aussi être un supermarché Carrefour en France ou un magasin d’apiculture aux pays bas. Ensuite, pour importer ces médicaments en Belgique, seul un distributeur européen agréé peut s’en charger à condition d’utiliser l’emballage correct prescrit pour la Belgique ou de disposer d’une ordonnance du vétérinaire en cas d’application de la cascade. L’import de ces médicaments n’est bien évidement possible que lorsque ces derniers sont autorisés sur le territoire belge. Il est à noter selon Erik Goris (VBI) que les pharmaciens ne sont pas au courant de cette procédure et que les apiculteurs ont de grandes difficultés à obtenir certains médicaments vétérinaires. L’AFMPS (Emmanuelle Vanaerschot) ajoute finalement que si les apiculteurs rencontrent des problèmes permanents de disponibilité de médicaments vétérinaires, ils peuvent les signaler à l’AFMPS afin que celle-ci puisse en rechercher la cause.