Le groupe de discussion EIP-AGRI (European Innovation Partnership) sur «la santé des abeilles et l’apiculture durable» a travaillé pendant l’année 2019 sur les facteurs clés déterminants pour la santé des abeilles. La question essentielle était : comment garantir la durabilité de l’apiculture face aux problèmes anciens ou émergents tels que les maladies, les ravageurs, l’intensification de l’agriculture et le changement climatique ? Il en a résulté un rapport paru dans le courant du mois de septembre.
La priorité a été donnée aux facteurs clés suivants :
- La disponibilité des connaissances et des compétences;
- La préservation d’un environnement durable;
- La détermination et l’évaluation de l’état de santé des abeilles mellifères;
- La résilience des abeilles et l’amélioration de leur bien-être;
- L’interprétation des données de surveillance et l’apiculture de précision;
- Les méthodes de gestion adaptées aux conditions locales;
- La préservation de la diversité génétique des abeilles;
- Les effets sublétaux des produits chimiques dans un environnement source de multiples facteurs de stress.
7 groupes d’experts internationaux ont travaillé sur ces différentes problématiques pour tenter de répondre aux besoins et anticiper les actions à mettre en place pour envisager un avenir à l’apiculture européenne.
Quels groupes de travail et quels experts ?
- Plateforme d’information au niveau européen – Etienne Bruneau (Coordinateur), Salvador Garibay, Florence Aimon-Marie, Ana Paula Sançana, Aleš Gregorc, Ulrich Bröker, Petko Simeonov
- Lutte contre les maladies et situations d’urgence – Fani Hatjina (Coordinatrice), Marc Bock, Pilar De la Rua, Constantin Dobrescu, Aleš Gregorc, Zeid Nabulsi, Ana Paula Sançana
- Prise en compte du bien-être des abeilles en production – Anna Dupleix (Coordinatrice), Etienne Bruneau, Ulrich Bröker, Robert Chlebo, Salvador Garibay, Petko Simeonov
- Unité de conseil en apiculture. Information et formation des apiculteurs –Stephen Sunderland (Coordinateur), José Antonio Ruiz, Louis Hautier, Zeid Nabulsi, Aleš Gregorc
- Améliorer l’état de santé des abeilles grâce à la surveillance des colonies et de l’environnement – Petko Simeonov (Coordinateur), Frens Pries, José Antonio Ruiz, Rober Chlebo, Louis Hautier, Fabio Sgolastra, Zeid Nabulsi, Simone Tosi
- Développer et améliorer les bonnes pratiques pour atténuer les principaux facteurs de stress pour la santé des abeilles : pesticides et manque de ressources – Simone Tosi and Louis Hautier (Coordinateurs), Frens Pries, José Antonio Ruiz, Florence Aimon-Marie, Zeid Nabulsi, Fabio Sgolastra
- Élevage d’abeilles durable – Frens Pries (Coordinateur), Pilar De la Rúa, Ana Paula Sançana, Fani Hatjina, Salvador Garibay
Au niveau belge, c’est Etienne Bruneau (CARI) et Louis Hautier (CRA-W) qui se sont impliqués dans les groupes de travail. Chacun des groupes de travail a produit des synthèses pour partager les résultats de leurs travaux. De nombreux conseils et perspectives sont exposés qu’il est bien difficile de résumer. En voici les principales proposition.
1 – Plateforme d’information au niveau européen
Principales propositions :
- Un réseau d’informations crédibles et validées rassemblées dans différentes régions de l’Union européenne pour prendre en considération les spécificités locales (culturelles, climatiques, agronomiques, apicoles).
- Des normes pour la collecte, la gestion et l’échange des données.
- Une amélioration de la connaissance sociologique des apiculteurs européens.
2 – Lutte contre les maladies et situations d’urgence
Principales propositions :
- Un indice de l’état de santé des abeilles domestiques avec des applications pratiques pour qu’un apiculteur puisse facilement évaluer la santé des colonies et les risques qu’elles encourent (effets des facteurs de stress).
- Une assistance rapide en cas d’urgence.
- La promotion d’alternatives aux produits chimiques de synthèse : biotechnique et résilience.
3 – Prise en compte du bien-être des abeilles en production
Principales propositions :
- Une meilleure connaissance de la qualité de l’environnement autour du rucher.
- Une adaptation des pratiques apicoles au changement climatique.
- La part tenue par l’alimentation des abeilles dans leur santé (fréquence, composition, qualité…).
- L’évaluation de l’impact des pratiques d’élevage sur la santé des abeilles.
4 – Unité de conseil en apiculture. Information et formation des apiculteurs
Principales propositions :
- La mise en place d’une base de données de la formation en apiculture en Europe (cours, ressources, etc.).
- La mise en place de normes communes pour la formation des apiculteurs.
- La mise en place d’une « licence apicole », une norme paneuropéenne de qualification apicole pour les apiculteurs sur base de l’éducation formelle, de la formation professionnelle des services de vulgarisation, de la formation continue…
- Le soutien des échanges entre apiculteurs, sources de formation continue via les partages de connaissances.
5 – Améliorer l’état de santé des abeilles grâce à la surveillance des colonies et de l’environnement
Principales propositions :
- L’amélioration de l’interprétation des données (capteurs) pour obtenir des conseils pratiques pour les apiculteurs.
- L’amélioration de la banque d’informations utiles au rucher pour une surveillance à distance et des prises de décision et déplacements efficaces.
- La création d’une base de données open-source gérée par une structure publique non commerciale.
- La normalisation des données pour une interopérabilité.
Principales propositions :
- L’amélioration de la connaissance des effets de l’exposition à des facteurs de stress agricoles : nouveaux produits chimiques, leurs effets sublétaux, leurs interactions avec d’autres produits chimiques ou d’autres facteurs de stress (qualité et quantité des ressources florales).
- L’identification, la communication et la mise en œuvre des pratiques d’atténuation chez les apiculteurs et les agriculteurs.
7 – Élevage d’abeilles durable
Principales propositions :
- La mise en place d’indicateurs dans le domaine de l’élevage (pratiques d’élevage, d’indicateurs de qualité, critères d’élevage).
- Le soutien de pratiques résilientes incluant diversité génétique et pratiques durables de sélection.
- La caractérisation et la conservation des populations locales pour augmenter le pool génétique (pratiques d’élevage locales, études de la relation entre comportement et écotypes, relations avec les pollinisateurs sauvages, etc.).
Ce qui émerge de ces propositions c’est l’importance donnée à la collaboration et aux échanges, que ce soit des échanges d’information, de pratiques apicoles, de ressources pour une meilleure formation des apiculteurs et une meilleure santé des abeilles. L’autre point semble être l‘intégration de l’apiculture dans un ensemble plus grand: un environnement, d’autres acteurs sociaux (agriculteurs)… Enfin, la mise en place de techniques, de services et d’outils pour faire face aux grands défis de notre temps, parmi lesquels, sans être exhaustif, on peut citer les espèces invasives et les modifications générées par les changements climatiques. Le maître mot de cet ensemble est résilience, des apiculteurs et des abeilles.