Samedi 3 juin : il fait plutôt calme lorsque j’arrive au rucher-école ce samedi. D’habitude à cette heure-ci, les autres élèves s’affairent déjà à enfiler les vareuses, à allumer les enfumoirs et à préparer le matériel pour les visites. Aujourd’hui, on dirait qu’il n’y a personne. J’avais pourtant noté dans mon agenda ce moment tant attendu : l’extraction du miel de printemps. Me serais-je trompée de date ?
Que nenni ! Le temps d’ouvrir la porte du rucher école, je comprends que tout le monde est au fond du local, dans la miellerie. Je rejoins le premier groupe d’élèves qui explique au groupe suivant comment désoperculer à la fourchette. Pour tout le monde, le geste semble un peu délicat au départ et chacun s’exerce quelques instants avant d’être à l’aise. C’est qu’il faut trouver le bon équilibre dans cette pratique : qu’on passe la fourchette vers la gauche, vers le haut, en plusieurs fois ou d’une seule traite, l’objectif est de désoperculer entièrement les cellules tout en veillant à y laisser un maximum de miel (soit d’en perdre le moins possible avec les cires d’opercules qui tombent dans le bac récupérateur).
Au fur et à mesure que les différents groupes d’élèves se succèdent pour participer à l’extraction, une certaine mécanique prend forme. Les uns désoperculent, les autres trient les cadres selon leur contenu en miel ce qui facilitera le travail de ceux qui veillent à équilibrer le poids dans les centrifugeuses. Le miel s’écoule dans des sceaux que d’autres vident tour à tour dans le maturateur, ceux-là même qui nettoient les tamis pour assurer une bonne filtration. En fait, c’est tout naturellement que les élèves proposent de l’aide et se succèdent dans des postes bien définis pour assurer en continu le bon déroulement de l’extraction. Cela ne vous rappelle-t-il pas quelque chose ? Voilà un joli parallèle : chacune à leur poste, nourrices, cirières, gardiennes ou encore butineuses, assurent quant à elles le bon fonctionnement de la colonie.
À l’extérieur, les abeilles s’agitent sous les 21°C provoqués par un ciel bleu et un soleil radieux. À l’intérieur, on s’agite aussi. Et dans cette agitation, on trouve l’occasion d’échanger entre élèves et formateurs. On partage nos aspirations, nos expériences, nos mésaventures mais aussi nos prises de conscience. Car l’extraction du miel est une des périodes pendant laquelle les apiculteurs mesurent le coût lié à la pratique (matériel, énergie, temps, attention). Mais l’odeur du miel fraîchement extrait et la satisfaction d’un travail réalisé dans le respect des bonnes pratiques, cela vaut peut-être le coup.
Avant de partir, j’observe le va-et-vient des abeilles à l’entrée de leurs ruches qui me rappelle celui des élèves dans la miellerie aujourd’hui. Je finirai alors par un dernier parallélisme. Pour moi, le rucher-école s’apparente lui-même à une ruche. Tous deux sont de petits espaces, où beaucoup de choses se passent…