Des cocktails de pesticides à faibles doses affectent la dynamique des colonies

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En raison de la large utilisation des pesticides et de leur persistance dans l’environnement, les organismes non ciblés par les traitements sont exposés de manière chronique à des mélanges de résidus toxiques. On évalue à plus de 98 % les insecticides pulvérisés sur les cultures et à 95 % les herbicides qui atteignent d’autres cibles que celles à qui elles sont destinées (1).

Parmi les espèces non-cibles touchées se trouvent les pollinisateurs et donc l’abeille mellifère. Il reste difficile d’évaluer le risque que cela représente pour les abeilles par manque de données concernant les effets toxicologiques des mélanges de pesticides. Une étude française récemment publiée (2)  permet d’avancer dans la connaissance à cet égard. Les chercheurs ont analysé des échantillons de pollens récoltés dans des colonies au développement moyen. Des échantillons de pollen ont été prélevés dans 4 ruchers entre mars et octobre 2014. Ils ont été ensuite soumis à des analyses multi-résidus.

Réseau de co-occurrences de résidus de pesticides détectés dans les échantillons de pollen prélevés. La taille des nœuds représente la fréquence à laquelle les pesticides ont été trouvés dans les échantillons de pollen. Les liens entre les pesticides représentent la probabilité de co-occurrence. Les composés ayant des modes d’action associés à des taux de croissance négatifs du couvain sont délimités par des cases. Les pesticides qui font partie des cinq mélanges testés sont surlignés en jaune. Le réseau n’inclut pas les pesticides qui ne coexistaient pas avec d’autres résidus.

Une fois identifiés, les mélanges de pesticides retrouvés dans les échantillons prélevés ont été testés sur le comportement et la physiologie des abeilles.  A l’issue de ces analyses, les chercheurs ont identifié deux mélanges de pesticides qui retardent l’apparition de la phase de butinage et ralentissent l’activité des abeilles contaminées. Les chercheurs ont remarqué que les abeilles exposées au cocktail de pesticides ont eu une longévité plus grande que les abeilles témoins ce qui n’étonne pas puisque leur phase de butinage, très consommatrice en énergie vitale, est écourtée. L’étude conclut qu’une exposition précoce à des cocktails de pesticides à faibles doses (c’est-à-dire à des doses non létales, en apparence inoffensives) peut se traduire par une durée de vie plus longue des abeilles qui sont par contre beaucoup moins efficaces.  Cela affecte donc la dynamique de la colonie.

Références:

(1) George Tyler Miller, Sustaining the Earth: An Integrated Approach, Thomson/Brooks/Cole, 2004, p. 211–216.

(2) Prado, A., Pioz, M., Vidau, C., Requier, F., Jury, M., Crauser, D., … & Alaux, C. (2019). Exposure to pollen-bound pesticide mixtures induces longer-lived but less efficient honey bees. Science of The Total Environment, 650, 1250-1260.