Ce Jeudi 16 Novembre se tenait dans les bâtiments du parlement Bruxellois un colloque dédié à la question du frelon asiatique dans la région bruxelloise. L’enjeu était notamment de s’organiser sur le territoire pour mettre en place une lutte efficace contre cet espèce invasive.
Ce colloque s’est vu agrémenté de l’intervention de 4 personnes impliquées dans la lutte contre le frelon asiatique :
- Louis Monéger : apiculteur bruxellois actif au sein du groupe F
- Gilles Lanio : apiculteur français dans le Morbihan, ancien président de l’UNAF
- Pieter Dewit & Bernard Demarteau : respectivement capitaine et caporal au SIAMU (Service d’incendie et d’aide médicale urgente de la région de Bruxelles capitale), impliqués par leurs fonctions dans la destruction des nids de frelons asiatiques.
S’en est ensuite suivi un temps de prise de parole par l’auditoire pour discuter de différents points relatifs à la gestion de Vespa velutina sur le territoire bruxellois.
Dans un premier temps, Louis Monéger est revenu lors de son intervention sur les notions biologiques du frelon asiatique afin de mieux comprendre l’espèce, son développement et son expansion fulgurante sur le territoire de la région de Bruxelles capitale. Selon des prévisions avancées par Mr Monéger, on peut s’attendre en 2024 (voire 2025) à un nombre de nids de frelons oscillant entre 130 et 140 nids rien que sur la commune de Woluwe-Saint-Pierre. Cette impressionnante expansion s’explique notamment par un environnement propice au développement du frelon asiatique en région Bruxelloise (tout comme sur le territoire français et belge de manière plus générale). Le frelon trouve en effet sur ce territoire un habitat, de la nourriture, des ressources en eau, un climat qui lui convient et une absence de prédateurs. Alors que certains parlent de la Bondrée apivore comme potentiel prédateur du frelon asiatique, Louis Monéger rappelle à l’auditoire que ce rapace n’est pas fortement présent sur notre territoire, qu’il est inféodé aux milieux forestiers et que c’est en outre un oiseau migrateur retournant vers le continent africain aux alentours du mois de septembre…
Louis Monéger a aussi rappelé à l’auditoire que le frelon asiatique constitue un problème de santé publique mais également un problème pour la biodiversité. En ce qui concerne la santé publique, le frelon asiatique est tenu responsable cette année de plusieurs incidents dans la région de Bruxelles-Capitale, certains ayant mené à des hospitalisations dues à des chocs anaphylactiques. Le secteur le plus touché étant celui des entreprises des parcs et jardins, jamais à l’abri d’une rencontre avec un nid de frelons asiatiques lors des activités d’entretien des espaces verts, surtout lorsque les nids sont situés à de faibles hauteurs. Statistiquement, 30% des nids trouvés se situent à moins de 10m du sol (nids primaires qui se sont développés en nids secondaires) et 70% au-dessus de 10m de hauteur. Pour la biodiversité, le frelon asiatique est également dommageable par sa consommation impressionnante d’insectes. C’est un chasseur opportuniste qui chasse de préférence là où il trouve de grandes quantités d’insectes. De la même manière que le frelon siège devant une colonie d’abeilles mellifères, il peut très bien aussi siéger devant un nid d’abeilles sauvages ou encore sur une source de nectar attirant bon nombre de pollinisateurs. On estime en moyenne la consommation annuelle en insectes d’un nid de frelon à 11,32 kg d’insectes par nid.
Dans un second temps, Gilles Lanio a pris la parole et a mis l’accent sur l’importance du piégeage des fondatrices au printemps, cette phase de développement de l’espèce constituant selon lui, le talon d’Achille de l’espèce. Le rayon d’action des fondatrices étant limité et en connaissance de l’emplacement des nids de la saison écoulée, il n’est pas compliqué de mettre en place un maillage efficace pour le piégeage des fondatrices à proximité des anciens nids. Dans sa région en France, il a pu constater grâce à un piégeage de printemps assidu, une diminution par 4 du nombre de nids en 4 ans, alors que le nombre de nids des régions voisines ne pratiquant pas le piégeage de printemps a explosé. Pour lui, la majorité de l’énergie investie dans la lutte contre le frelon devrait être investie dans le piégeage de printemps, la destruction des nids ne devant être qu’un dernier recours (sic). Le piégeage de printemps est en effet beaucoup moins onéreux que la destruction des nids et ne demande pas l’utilisation de perméthrine, souvent remise en cause par son impact sur l’environnement (rediscuté par la suite en fin de colloque).
La dernière intervention a été celle du SIAMU représenté par le capitaine Pieter Dewit. Les chiffres de leurs interventions confirment bien l’expansion fulgurante du frelon asiatique sur le territoire bruxellois, le nombre d’intervention étant passé de 4 à 670 entre 2019 et 2023. Ils expliquent également que les interventions sont nombreuses et onéreuses et que le budget de 20 000 € qui y est dédié a largement été dépassé. Ils estiment toutefois qu’il est important que le service reste gratuit pour que les citoyens continuent à appeler lorsqu’ils dénichent un nid de frelon asiatique. Afin de diminuer les « fausses alertes » par exemple lorsqu’ils sont appelés plusieurs fois pour un même nid qui a déjà été détruit, ils mettront en place un système de marquage des nids à l’aide de bombes de couleurs.
Enfin, une fois les interventions clôturées, c’est l’auditoire qui s’est exprimé. L’utilisation de la perméthrine pour la destruction des nids a été discutée et plusieurs craintes émergent quant à l’impact de ce produit sur l’environnement et au développement potentiel d’une résistance du frelon asiatique face à ce produit (ce qui n’est pas impossible selon les intervenants). D’un point de vue environnemental, il est énoncé lors de ce colloque que la perméthrine a une demi vie variable entre 3 à 180 jours selon les conditions dans lesquelles elle se dégrade (en présence ou pas d’oxygène). Il est bien reconnu que l’utilisation de ce produit n’est pas l’idéal d’un point de vue environnemental mais qu’elle permet aujourd’hui tout de même une destruction efficace des nids de frelons asiatique. Afin de diminuer sa consommation, il faudrait soit trouver un autre produit tout aussi efficace, soit diminuer le nombre de nids à détruire. Pour ce faire, le piégeage des fondatrices au printemps se propose comme solution potentielle. En ce qui concerne les autres produits de destruction qui pourraient être utilisées, on parle aujourd’hui de la terre de diatomée. C’est actuellement possible en France mais pas encore en Belgique étant donné qu’aucune agrégation du produit n’a encore été demandé sur le territoire belge.
Nota bene: les propos rapportés ici sont de la seule responsabilité de ceux qui les ont prononcés.