Un apiculteur bien formé en vaut deux

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Une étude publiée dans PLOS One le 9 mars dernier pointe la responsabilité des  apiculteurs amateurs dans les pertes de colonies d’abeilles domestiques. Ces résultats s’appuient sur un réseau de surveillance (EPILOBEE) comptant 5798 ruchers dans 17 pays européens pendant 2 années consécutives (entre l’automne 2012 et l’été 2014). Les pertes hivernales relevées vont de 2 à 32 %.  Selon les chercheurs, les ruchers des apiculteurs professionnels n’ont jamais montré de signes de maladie contrairement aux ruchers des apiculteurs amateurs qui ont présenté des symptômes d’infection bactérienne et une forte infestation par Varroa destructor.

Taux de mortalité – 1° année

 

Taux de mortalité – 2° année

Les pratiques apicoles sont nettement pointées du doigt par cette étude et tout spécialement les pratiques apicoles des amateurs. Le fait n’est pas nouveau. C’est même une pensée communément exprimée. Le rapport « Bee health in Europe – Facts &  figures 2013 » publié par le think tank OPERA ne disait rien d’autre:

« Data from COLOSS show an interesting aspect of bee mortality—in most countries, hobby beekeepers managing 1 to 50 colonies reported higher losses than beekeepers managing larger number of colonies. It is clear then that beekeepers themselves play a critical role in maintaining bee health. Knowledge of bee biology, beekeeping techniques, disease biology and treatments as well as suitable equipment is essential. »

(« Les données de COLOSS montrent un aspect intéressant de la mortalité des abeilles – dans la plupart des pays, les apiculteurs de loisir qui gèrent entre 1 et 50 colonies ont signalé des pertes plus élevées que les apiculteurs qui gèrent un plus grand nombre de colonies. Il est clair donc que les apiculteurs eux-mêmes jouent un rôle essentiel dans la préservation de la santé des abeilles. La connaissance de la biologie des abeilles, des techniques d’apiculture, de la biologie des maladies et des traitements ainsi que des équipements appropriés est essentiel. »)

« In many European countries, the majority of beekeepers pursue this activity as a hobby. For example, in Germany 80% of beekeepers keep just 1–20 colonies, 18% keep 21–50 colonies and only about 2% keep more than 50 colonies. Improved expertise and education are likely to have a significant impact on bee health. Better beekeeping and state-of-the-art equipment would lead to healthier bees, higher quality and increased volumes of bee products, easier data collection and improved disease treatment. »

(« Dans de nombreux pays européen, la majorité des apiculteurs poursuivent cette activité comme passe-temps. En Allemagne par exemple, 80% des apiculteurs élèvent de 1 à 20 colonies, 18% de 21 à 50 colonies et seulement 2% ont plus de 50 colonies. L’amélioration de l’expertise et de l’éducation pourrait avoir un impact important sur la santé des abeilles. Une meilleure apiculture et des équipements de pointe conduiraient à une amélioration de la santé des abeilles et à une meilleure qualité des produits de la ruche, à une collecte plus facile des données et à un traitement amélioré des maladies. »)

Si l’on peut comprendre aisément que les apiculteurs ayant une meilleure connaissance puissent plus facilement détecter et gérer les maladies et mettre en oeuvre les mesures prophylactiques qui s’imposent et si, en toute logique, de bonnes pratiques apicoles ont des conséquences positives sur la santé des colonies, la corrélation nous semble cependant rapidement faite entre pratique de loisir et mauvaise apiculture. Soulignons par exemple que la Belgique, qui compte une très large majorité d’apiculteurs amateurs, a été un pays précurseur par la diffusion du Guide des bonnes pratiques apicoles et dispose d’un réseau dense de ruchers écoles et d’un encadrement sérieux de la formation. Le pays dispose en outre de nombreux apiculteurs chevronnés qui ne vivent pas à 100% de leur apiculture mais qui pratiquent une apiculture de pointe.  La stigmatisation de l’apiculture « de loisir » semble un peu rapide à l’échelle d’une période de deux années.  D’ailleurs, les chercheurs reconnaissent les limites de leur protocole ainsi que la nécessité de confirmer les facteurs de risque. L’étude suggère surtout l’importance de la formation et de l’éducation de l’apiculteur.

La publication souligne d’autres points comme par exemple le fait que les ruchers ayant subi des pertes estivales élevées sont susceptibles de subir des pertes hivernales élevées. Les chercheurs préconisent également de creuser l’impact d’autres facteurs sur la santé des abeilles comme les facteurs environnementaux (rôle du climat dans les pertes hivernales par exemple), l’utilisation des terres agricoles et la responsabilité des pesticides.

A suivre!